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Retour sur l'Agora Jeunes "Imaginer des futurs désirables, et passer à l'action !"



Les 6 et 7 octobre dernier se tenait l’Agora Jeune, à l’Académie du Climat à Paris. Axé autour de l’imagination de futurs désirables pour passer à l’action, cet événement venait clôturer les deux ans du Programme Jeunes. Mené par le Mouvement Colibris, avec le soutien de la Fondation SNCF, ce programme a permis de rencontrer, donner la parole et accompagner des jeunes entre 18 et 30 ans qui s’engagent sur les enjeux écologiques, démocratiques et solidaires.

Le coup d’envoi de ces deux jours était donné par une table-ronde autour des différentes formes d’engagement des jeunes à l’occasion du lancement du dernier numéro de la revue 90° Génération Bascule. Parmi les intervenant·es de cette table-ronde, on retrouvait notamment Pauline Fricot et Aude Cazorla, deux des huit jeunes journalistes qui ont réalisé ce numéro. À leurs côtés, Julien Broual, maraîcher en permaculture dans la commune de Kembs (68) — territoire accompagné par Colibris dans le cadre de TE —, Maxime Michaud, jeune délégué au Conseil de la Jeunesse 2022-2023 et chargé de mission Politiques Internationales chez les Scouts et Guides de France, et Maxime Ollivier, activiste et danseur, co-fondateur du collectif d’« artivistes » Le Bruit qui Court. Le débat était animé par Gabrielle Paoli, ex-colibri et co-directrice de la rédaction de « Génération bascule ».

Des jeunes en quête de sens dans leur activité

Dans des domaines divers, ces cinq jeunes témoignent avoir choisi des activités dans lesquels ils et elles trouvent du sens et qui leur permettent de se positionner dans le monde en cohérence avec leurs convictions. En devenant journaliste, Pauline explique avoir « réalisé son rêve d’enfant ». « Depuis le départ », elle voit son métier « comme un levier pour [s]’engager » et « rendre visible l’invisible », notamment sur les enjeux écologiques. Aude, passionnée d’écriture, a elle aussi trouvé dans le journalisme un moyen de « mettre son art au service de la défense des causes » qui lui tiennent à cœur et de « donner la parole à ceux qui ne l’ont pas ».

« Le journalisme est un moyen de donner la parole à ceux qui ne l’ont pas », Aude Cazorla

La parole, Maxime Michaud, lui n’a pas hésité à la prendre. Il multiplie les fonctions de représentation pour « porter la voix des jeunes ». Après avoir été représentant du scoutisme international, notamment lors de la COP26, puis délégué du conseil national de la jeunesse français auprès de l’Union Européenne — « une instance qui permet de faire dialoguer les jeunes dans la construction des politiques publiques européennes », explique-t-il –, il pense aujourd’hui devenir gendarme pour la « dimension sociale » du métier.

Maxime Michaud, jeune délégué au Conseil de la Jeunesse et chargé de mission Politiques Internationales chez les Scouts et Guides de France

Dans un tout autre domaine, c’est dans le maraîchage que Julien Broual a quant lui trouvé sa voie. « Pas de métaphysique, moi je suis plutôt plancher des vaches ! » ironise-t-il. Employé municipal dans la commune de Kembs (68), il accueille régulièrement des scolaires qui viennent découvrir comment poussent les légumes et mettre les mains dans la terre sur cet ancien terrain de foot communal reconverti en espace nourricier. « L’impact positif de mon action », se réjouit-il, « je le vois tous les jours : quand j’ai réussi une culture, quand on a pu récolter des carottes avec les enfants, je suis content, ça donne envie de continuer ».

« L’impact positif de mon action, je le vois tous les jours : quand on a pu récolter des carottes avec les enfants, ça donne envie de continuer », Julien Broual

Si la COP21 à Paris en 2015 a servi pour beaucoup de déclencheur en termes de prise de conscience des enjeux écologiques, c’est un tout autre événement qui a poussé Maxime Ollivier à passer à l’action et à s’investir dans le mouvement climat. La démission de Nicolas Hulot, alors ministre de l’écologie, en direct à la radio à la fin de l’été 2018 lui fait « perdre foi dans les institutions politiques », déclare-t-il. Il organise alors une dizaine de marches pour le climat, participe à des actions de désobéissance civile, mais il « [s]’épuise dans ce contre-pouvoir permanent ». « On fait des demandes à des politiques qui ne parlent pas le même langage que nous », déplore-t-il. Son engagement militant commence à empiéter sur sa vie personnelle et ses relations : « je suis fatigué, je commence à couper les ponts avec ma famille et mes ami·es parce qu’on ne parle plus le même langage », confie-t-il. Alors qu’il considère avoir tout essayé — « militer "contre" dans une association », « militer "pour" dans le cadre électoral » – il se dit qu'« il faut que je fasse ce qui me fait du bien ». En l’occurrence, pour lui, c’est la danse. Il lance alors avec des ami·es un collectif d’« artivistes », Le bruit qui court, avec une ambition : « mettre l’art au service des luttes ».

« Il faut que je fasse ce qui me fait du bien », Maxime Ollivier

Un engagement qui n’est pas sans coût

Comme le montre l’histoire de Maxime Ollivier, l’engagement a parfois un coût. « Être à la fois artiste et militant, pour les parents ce n’est pas rassurant, ça paraît complètement irrationnel d’un point de vue économique », ironise-t-il. C’est d’ailleurs ce que soulèvent également Pauline et Aude, toutes deux étant passées par le statut très précaire de journalistes indépendantes. « C’est un statut que j’aime énormément mais que j’ai dû abandonner car c’était trop difficile financièrement », regrette la première. Et Maxime Michaud de reconnaître : « l’engagement, c’est un sport de riches ».

« L’engagement, c’est un sport de riches », Maxime Michaud

Au-delà des difficultés financières, trouver un travail en accord avec ses valeurs entraîne parfois des tiraillements. Aude se trouve confrontée à un dilemme : pour pouvoir parler des thèmes qui lui sont chers, de l’écologie, des classes populaires, elle doit plutôt se tourner vers des médias indépendants, les médias classiques laissant peu de place à ces sujets mais cela au risque « de prêcher des convaincu·es ». Ne vaudrait-il pas mieux « faire son chemin dans les médias plus classiques en essayant d’y amener ces thèmes ? ». Elle n’a pas tranché pour l’instant...

L’importance des récits et des émotions

« C'est parce qu’on va générer de la joie que les gens vont avoir envie de venir » Maxime Ollivier

Autre sujet de débat au cours de cette soirée : quelle importance accorder aux récits et aux émotions dans la lutte écologique ? Maxime Ollivier défend le pouvoir de l’art et des émotions : « je ne pense pas que ce sera seulement via la lecture des rapports du GIEC qu’on va mettre les gens en mouvement [...]. Je crois que c’est parce qu’on va générer de la joie que les gens vont avoir envie de venir ». Pauline renchérit sur l’importance des récits : « j’étais le genre de personne qui allait voir ses parents avec des chiffres pour leur dire il faut agir ! Un jour mon père a lu Impact, d’Olivier Norek, un roman policier dans lequel le personnage kidnappe le PDG de Total, et le livre citait un article de Novethic, le média dans lequel je travaillais à l’époque. Alors qu’il ne l’avait jamais fait jusque-là, mon père est allé lire l’article, ça a permis d’engager un dialogue. Donc l’art peut vraiment nous impacter ! ».

Pauline Fricot, une des huit journalistes de la revue 90° "Génération Bascule"

Au-delà de la question des récits, Maxime Michaud insiste également sur l’enjeu de la représentation : pour mobiliser les jeunes, il faut qu’ils et elles se sentent représenté·es. Car, dans leur diversité, loin des clichés, les jeunes ne constituent pas un bloc homogène.

Une jeunesse qui ne constitue pas un bloc homogène

À propos de leur entourage, Aude et Pauline décrivent une jeunesse « consciente des enjeux écologiques » et qui partage une « volonté de casser les codes », dans tous les domaines – « dans mon cercle d’ami·es, on parle d’amour, on parle de travail » livre Pauline. « Ma conception du travail a beaucoup changé » rebondit Aude, on refuse de « mettre tous nos œufs dans le même panier, on sait quelles sont nos valeurs, on va aller essayer des choses, et si ça ne marche pas, on va tenter autre chose, on va aller se former ».

Aude Cazorla, une autre plume de 90°

Si Aude et Pauline reconnaissent être entourées de jeunes qui leur ressemblent, Julien décrit une jeunesse plus contrastée, aussi contradictoire que les autres générations : « je vis et travaille dans un ghetto de riches, frontalier de la Suisse. Les questions écolos animent bien nos discussions du dimanche mais on continue à rouler dans nos Tesla et nos grosses Mercedes ». « Il y en a qui savent pas planter une carotte mais qui partent en avion mesurer l’impact du changement climatique au Groenland, il y en a aussi qui participent à des projets de politique de la ville en lien avec d’autres publics et d’autres problématiques ». Bref, une « jeunesse extrêmement diverse et variée », comme en témoignent également les rencontres de Maxime Michaud au cours de ses divers engagements.

La nécessité de l’intergénérationnel

« Les deux tiers des bénévoles associatifs en France aujourd’hui sont des retraité·es. On a besoin de faire avec eux ! » Maxime Ollivier

En réalité, souligne Maxime Ollivier, « je suis mal à l’aise avec le fait qu’on nous dise "vous les jeunes" alors qu’on a besoin de porter le lien intergénérationnel ». « Les deux tiers des bénévoles associatifs en France aujourd’hui sont des retraité·es », rappelle-t-il, « on a besoin de faire avec eux ! ». D’autant que « ce qu’on porte aujourd’hui, nous écolos, c’est du bon sens que portaient déjà nos grands-parents », donc « ils peuvent nous aider » à mettre fin à la « parenthèse libérale » que l’on vit aujourd’hui. « Merci aux personnes qui sont écolos depuis 40 ans, comment vous avez fait ?! » ajoute-t-il, « merci ! et faisons des choses ensemble pour faire basculer nos sociétés ! ». Une belle invitation à sortir des clivages et à aller vers plus d’intergénérationnel qui conclut parfaitement cette table-ronde de lancement du 90° « Génération bascule », qui, Pauline tient à le souligner en guise de dernier mot, « a été un grand espace de liberté pour nous, jeunes journalistes, et c’est rare qu’on nous fasse confiance ainsi ! ».

Des ateliers pour passer à l’action...

Après une bonne dose d’inspiration, la journée du samedi était consacrée au passage à l’action. Divisés en petits groupes, les participant·es se sont réparti·es dans les différentes animations organisées par le Mouvement Colibris et ses partenaires. Entre l’atelier sur les émotions animé par Yann Urbon, la simul’action pour réagir face aux vagues de chaleur en ville de l’association CliMates, le jeu de sensibilisation aux enjeux écologiques et sociaux Bruco proposé par l'association Fantastiko, ou encore l’atelier de facilitation avec Charlotte Goupil, il y en avait pour tous les goûts ce matin-là à l’Académie du Climat ! Le buffet partagé fut ensuite l’occasion d’échanger plus en profondeur : au-delà de la diversité des profils – lycéenne parisienne, futur prof en banlieue, jeune porteur de projet en milieu rural, étudiante, militante associative, etc. – les mêmes questionnements et une aspiration commune au changement.

L’après-midi a ensuite repris avec les témoignages des jeunes porteurs et porteuses de projet accompagné·es par le Mouvement Colibris pendant deux ans dans le cadre du Programme Jeunes. Fort de son succès, ce programme sera reconduit à partir de 2024 autour d’une ambition renouvelée : continuer à explorer les futurs désirables et garantir le rôle des jeunes dans les territoires accompagnés dans le cadre de la campagne Nouvelle (R).

... En imaginant des futurs utopiques !

En parallèle, était organisé un atelier d’écriture haut en couleur avec le philosophe et auteur de La Banlieue du Turfu, Makan Fofana, autour de la question « Inventez l’IA écologique du futur ». Si « les trois quarts des groupes ont spontanément tendance à imaginer des dystopies au début », explique Makan, qui anime ces ateliers depuis plusieurs années, ce n’est pas une fatalité : la créativité débridée dont témoigne la restitution finale nous montre que l’utopie est à portée d’imagination !

C’est aussi la conviction de l’atelier « Voyage en 2030 glorieuses » par lequel se sont achevés ces deux jours d’agora sur les nouveaux imaginaires : une invitation à se projeter dans « cette époque fabuleuse dans laquelle on a fait émerger une société plus juste, plus durable et plus heureuse ! ». Dans une Nouvelle (R) en somme...


Crédits photos : ©Patrick Lazic


Pour aller plus loin

- Le Programme Jeunes

- La campagne Nouvelle (R)

- Le Bruit qui court

- Association CliMates

- 2030 Glorieuses



L'Agora Jeunes a été organisée avec le soutien de la Fondation SNCF.

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